Cela vous est surement déjà arrivé…. et vous vous demandez surement ce qui va suivre!!!
Un propriétaire vous confie la vente de son bien et là, surprise, vous apprenez qu’il est occupé par un locataire. Quelles sont les possibilités de mise en vente? L’aventure de Julie vous donnera les clefs pour vendre un bien loué.
Janvier c’est l’occasion de recontacter les gens qu’on n’a pas vus depuis plusieurs mois, pour leur souhaiter la meilleure année possible. A cette occasion je téléphone à Julie pour prendre de ses nouvelles. Après les échanges habituels ; »….et surtout la santé!!! » elle me dit que l’année ne commence pas très bien pour elle, car le propriétaire de l’appartement qu’elle loue a décidé de vendre et qu’elle doit quitter son nid douillet dans 3 mois.
Aïe la tuile ! Elle s’inquiète car elle a récemment changé de travail et elle pense qu’il lui sera difficile de se reloger, son dossier de candidature étant un peu moins glamour. Période d’essai signifie souvent « désolé votre dossier n’a pas été accepté » quand on cherche une location. Elle s’imagine errant dans la rue cherchant un endroit où s’abriter.
Surtout 3 mois c’est court pour trouver une solution. Je sens son désarroi et quelque chose m’interpelle dans son récit. Trois mois effectivement, ça ne ressemble pas à un délai légal pour donner congé. Je lui propose donc de la revoir le lendemain afin d’étudier la question. Je lui demande de venir avec son bail de location. J’ai trois points à vérifier.
1 Quelle est la date du bail?
Qu’il s’agisse d’un bail location meublée d’un an, ou d’un bail location vide, le congé ne peut intervenir qu’à la date de fin de bail. Julie a loué son appartement un an auparavant, soit le 7 avril 2019. Le bailleur lui a demandé de partir par téléphone pour le 7 avril 2020. Mais allons plus loin
2 Quelle est la nature du bail signé?
Le bail meublé a une durée d’un an, le bail mobilité 10 mois maximum, et le bail location vide trois ans. Julie a signé un bail location vide qui court du 7 avril 2019 au 6 avril 2022. Donc là, j’ai un premier point pour la rassurer, le bailleur ne peut lui donner congé avant la date du 6 avril 2022
3 Quel formalisme?
Le bailleur doit respecter un certain formalisme pour délivrer un congé valable. Il est normal qu’on ne puisse pas mettre à la porte un locataire d’un simple coup de téléphone.
Il doit délivrer son congé au plus tard 6 mois avant l’échéance du bail, par courrier recommandé avec accusé de réception ou par exploit d’huissier car le dit congé doit comporter plusieurs clauses obligatoires, sous peine de nullité.
Enfin, le propriétaire doit avoir un motif réel et sérieux pour récupérer le logement.
Soit il souhaite le mettre en vente et dans ce cas la locataire est prioritaire pour l’acquérir, soit il veut le récupérer pour y vivre personnellement ou y loger un proche, ou encore pour un motif légitime tel que non paiement du loyer ou troubles de voisinage mais le motif doit être clairement énoncé pour être valable. Julie, solennelle, lève la main droite et me jure qu’elle est à jour de ses loyers et qu’elle est très appréciée de ses voisins. Voilà un bon point pour elle!
Si le propriétaire veut vendre son bien, le congé vaut offre au profit du locataire. Celui ci a deux mois pour répondre, à défaut il sera considéré comme n’étant pas intéressé pour acheter. S’il souhaite se porter acquéreur, il doit donc le faire savoir, et il a ensuite 4 mois ( en cas de recours à un prêt immobilier) pour procéder à l’acquisition définitive devant notaire. Si le prix est revu à la baisse au cours de la commercialisation, ce qui arrive fréquemment, alors la préemption du locataire s’exerce à nouveau et il a de nouveau un délai de 2 mois pour exercer ses droits. Chers propriétaires, il est donc inutile de gonfler le prix de vente pour décourager votre locataire !
A noter que le propriétaire peut également choisir de vendre l’appartement occupé auquel cas il n’a aucune obligation de le proposer à son locataire, ni même lui délivrer congé pour cela. L’acquéreur reprendra la suite des obligations du bailleur, le bail en cours se poursuit dans les mêmes conditions.
Je vois Julie retrouver son sourire, la voilà à l’abri de toute expulsion, au moins jusqu’à la fin de son bail.
Je l’alerte également sur les sanctions prévues par la loi si son bailleur ne respecte pas les règles du jeu. Il risque une amende de 6000€ , et le locataire peut réclamer une indemnisation.
Elle a toutes les cartes en mains pour entamer les discussions avec son bailleur . Et devinez quoi? Elle a bien exposé les différents points dont nous avions parlés.
Le propriétaire lui répond alors qu’il a un besoin urgent de vendre et lui demande si elle serait intéressée pour se porter acquéreur, en lui proposant un prix tout à fait attractif. Le propriétaire a compris qu’il devrait attendre pour le mettre en vente, donc il avait tout intérêt à ce que sa locataire achète l’appartement, quitte à négocier son prix, lui faisant ainsi gagner de précieux mois. Elle n’y avait pas pensé, elle se renseigne auprès de sa banque qui lui valide la possibilité de la financer une fois que sa période d’essai sera achevée dans quelques mois. Elle s’entend donc avec le propriétaire pour signer un compromis de vente dans les 6 mois. Elle sera définitivement chez elle avant la fin de l’année !
Julie est donc passée de future sans domicile à propriétaire d’un charmant deux pièces à un prix tout à fait raisonnable. Julie m’a d’ores et déjà envoyé une invitation pour la pendaison de crémaillère le 15 décembre 2020.
Ce qu’il faut retenir :
- On peut mettre en vente un logement occupé par un locataire dès lors que son bail est intégré dans les conditions de la vente.
- Si on veut vendre le bien libre de toute location, alors on doit respecter un formalisme précis
- Sauf à prouver un rendement locatif exceptionnel, la vente d’un bien occupé subi souvent une décôte (la zone géographique est déterminante, il est plus facile de vendre un bien déjà loué dans une grande ville, qu’au milieu d’une zone rurale)
- On fait attention si son locataire a plus de 65 ans
Question subsidiaire : quid du locataire qui n’a pas de bail écrit en bonne et due forme? Si le locataire est en mesure de prouver qu’il paie régulièrement loyer et charge, et qu’il a souscrit des contrats type électricité, assurance, eau… alors la justice lui reconnaîtra les mêmes dispositions qu’un bail écrit, régi par la loi du 6/07/89.
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