Faut il cacher son vice?

La semaine dernière, mon ami Stéphane me raconte, angoissé, une aventure désagréable qui lui arrive. Il a reçu l’appel d’un de ses clients de l’année dernière, très remonté après lui, le menaçant de lui intenter un procès.  Il a besoin de mon avis pour savoir ce qu’il doit faire, il se demande s’il n’a pas commis une erreur. Cela fait pourtant 5 ans qu’il exerce en tant que mandataire, d’une manière très professionnelle. Il est très consciencieux.

Voici ce que lui raconte l’acquéreur: la maison, acquise 4 mois auparavant, se fissure, principalement dans la pièce de vie. Cette maison, il pensait y être heureux. Quelques mois après, c’est la catastrophe, il s’inquiète, la maison pour laquelle il s’est endetté sur 20 ans, est elle en train de s’effondrer? Il lâche alors les deux mots qui terrifient les agents immobiliers ( beaucoup plus que les vendeurs d’ailleurs!!) : VICE CACHE. L’agent immobilier qui n’a pas forcément une expérience en la matière, et heureusement….. peut s’inquiéter d’une telle menace. Immédiatement il voit un procès, un coûteux dédommagement, la fin de sa carrière.

Je suis très ennuyé pour Stéphane, d’autant plus que j’ai la certitude qu’il a fait son travail correctement. Je vais tenter de le rassurer. Mais , en tout état de cause, en tant que professionnel, ses erreurs seront couvertes par son assurance responsabilité professionnelle, dont il acquitte la prime chaque année.

C’est un coup dur dans la vie professionnelle d’un agent immobilier mais il y a des solutions donc inutile d’envisager la fin du monde. On est là pour satisfaire nos clients, et surement pas pour transformer en cauchemar l’un des moments les plus joyeux de leur vie.

Dans un premier temps, si le client veut bien nous recevoir, je propose d’aller voir la maison. Je ne suis pas expert en pathologie du bâtiment mais je veux me rendre compte de l’ampleur du problème, afin de l’orienter au mieux. Dans mon article sur les fissures, j’ai pu lister les caractéristiques des fissures qui doivent alerter et qui requièrent l’avis immédiat d’un spécialiste.

Pour en savoir plus Ce que nous murmurent les fissures…

Effectivement d’importantes fissures sont apparues sur les quatre murs du séjour. Quelques questions au propriétaire des lieux me permettent de déterminer qu’il n’a pas fait de travaux, que la maison était impeccable à son entrée dans les lieux. La maison semble bien ventilée et à l’extérieur, aucun signe de fissure.

L’ancien propriétaire aurait t-il masquer des fissures volontairement avant la vente? Le mandataire et le client sont d’accord pour dire qu’il n’y avait pas de fissures quand ils ont visité la maison à plusieurs reprises. Alors que faire?

Concrètement, la responsabilité du vendeur peut elle être engagée ? Car c’est bien sûr le sous entendu. L’acquéreur est prompt à demander un dédommagement mais ce n’est pas aussi facile et évident, que ça.

Tout d’abord, soit la maison a été construite il y a moins de 10 ans, auquel cas il y a encore des garanties qui courent sur le bien ( acquises auprès du constructeur), notamment la garantie décennale (10 ans) qui couvrent les désordres liés à la construction ; mais si la maison est ancienne il n’y a plus de garantie. Allez donc rechercher la responsabilité de l’architecte ou des maçons d’une maison construite en 1920!

Quand vous vendez une maison ancienne, sachez que le vendeur, à moins d’être un marchand de biens, est exonéré de toute garantie de vices cachés. Ah bon? Et vous cher agent immobilier, même pas concerné ! Et oui! En effet,  l’agent immobilier en tant qu’intermédiaire, n’est pas impliqué dans les défauts éventuels d’une maison qu’il vend. ATTENTION, on ne parle pas des personnes malhonnêtes qui sont informées d’un problème et qui le dissimulent volontairement ( par exemple vous omettez d’informer l’acquéreur, alors que vous en avez connaissance, que la maison a subi de gros travaux de renforcement des fondations, ce qui potentiellement, peut avoir une incidence sur la solidité de la construction).

Aujourd’hui les nombreux diagnostics permettent d’avoir une information assez complète sur les éventuels causes naturelles des désordres. Encore faut il lire les rapports! Par exemple, les mouvements de terrains, les inondations, les sécheresses reconnues « catastrophes naturelles » provoquant des gonflements ou retraits des zones argileuses sont indiqués. Votre attention doit être attirée sur le fait que la maison a peut être bougé et subi des dégâts. N’hésitez pas à poser des questions au vendeur à ce sujet.

Pour qu’un préjudice soit reconnu, il faut prouver:

  • que le défaut était antérieur à la vente
  • que le défaut a été volontairement dissimulé par le vendeur
  •  qu’il est de nature à rendre le bien impropre, ou diminuer son usage ( des fissures dites « esthétiques » ne seront pas retenues en tant que vice caché car elles ne portent pas atteinte à la solidité)

Certains défauts les plus graves affectant l’ouvrage peuvent impacter la solidité du bâtiment, il faut donc être vigilant.

Je conseille au propriétaire de faire appel à un professionnel du bâtiment pour avoir une explication, quant à l’origine de ces fissures, qui restent des micro fissures. Sans doute faudra t-il surveiller leur évolution, ce qui est un bon moyen d’évaluer leur importance.

Dans le cas qui nous intéresse, le professionnel nous indique que ce type de fissures est caractéristique d’un enduit mal fait et d’une application de peinture trop épaisse. Le précédent propriétaire avait repeint lui même sa maison au moment de sa mise en vente pour présenter un bien en bon état mais n’étant pas professionnel, le travail n’était pas de qualité. Le propriétaire est rassuré, bien que la rénovation en peinture du séjout soit inévitable.  Mais c’est un moindre mal.

Stéphane est rassuré, sa responsabilité n’est pas mise en cause. Il a bien fait son travail. Je lui rappelle tout de même qu’en tant que professionnel il doit attirer l’attention de ses vendeurs sur la transparence qu’ils doivent apporter pour qu’une transaction immobilière s’effectue en toute tranquillité. Un mur un peu défraichi sera toujours moins inquiétant qu’un mur fraichement repeint, dans l’esprit de l’acquéreur! Il vaut mieux voir les défauts avant, et acheter en connaissance de cause.

Il y a quelques année, j’ai même vendu une maison nécessitant d’importantes reprises des fondations, ce qui impliquait un budget travaux conséquent mais les vendeurs étaient conscients du problème et proposait un prix de vente de leur bien en rapport avec ces travaux à prévoir. L’acquéreur a pris tous les avis des professionnels préalablement à son engagement, a fait réaliser les travaux et possède aujourd’hui une maison bien solide, très bien placée, pour un prix bien inférieur au prix du marché. Tout ça pour dire que rien n’est rédhibitoire!

Enfin, l’erreur peut arriver et on peut se tromper en tant que professionnel. L’assurance responsabilité civile professionnelle est là pour ça. Si les conséquences de notre erreur, cause un préjudice à l’acquéreur, l’indemnisation sera prise en charge par l’assurance. Chacun des professionnels est tenu de s’assurer, pour la tranquillité de tous. Vos clients seront rassurés de savoir que vous êtes couverts, même si on préfère toujours éviter d’en arriver à dédommager un client.

Pour obtenir l’information nécessaire à une bonne connaissance du métier, inscrivez vous à mon blog et je partagerai avec vous mon expérience.

 

 

 

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